La force centripète n'y pourra rien...

C'est toujours difficile de quitter la turbine.

Ces milles petites choses qui vous collent, qui vous retiennent, ces mots que l'on dit qui font qu'on vous rappelle, et puis... on oublie. On oublie qu'ailleurs les fleurs aussi existent, pas simplement imprimées sur des bottes en vinyl, que le ciel n'a pas de limite, que le vent peut charier d'autres parfums que les ondes métalliques que l'on se prend à ne plus remarquer.

La force centripète de la machine vous ramène à l'épicentre de votre vie urbaine tous les soirs et vous expulse à nouveau en d'autres centres, dans le flot des matins de Panurge. Plaqué contre la vitre à humer des humeurs noires, on oublie. On oublie qu'il existe ailleurs un monde, à la lisière des chemins de fer, où on peut étendre les bras sans atteindre de murs, où on peut courir sans s'arrêter et s'asseoir à des kilomètres du point de départ.

Mais il suffit pourtant d'une brèche, d'une fissure du temps pour saisir le moment. On cligne des yeux, un peu hagard, mais on sait qu'elle est là, la Force contraire, celle qui va nous emmener loin, aussi loin que va l'écho. Une fois qu'elle nous tient pourtant, alors qu'on a dormi si longtemps, un rien fait qu'on s'insurge, qu'on s'agrippe, qu'on s'agraffe à la force centrifuge avec l'idée vaine et floue qu'on pourrait ne plus revenir...

D'habitude mes horizons ressemblent plutôt à ça...

Et l'espace laisse peu de place au rêve...

Alors forcément, si on arrive jusque là, on a d'abord du mal à croire qu'on le mérite. 'Paraît pourtant qu'il fut un temps, une nuit, une nuit des temps, où on barbotait tous dans le même bain, alors quitte à aller loin, autant aller là d'où on vient...

N'est-ce pas ?

Pourtant le départ fut difficile...

Il fallut prendre notre flemme à deux mains, celle du dimanche matin, se lever, se laver, avaler vite vite un bout d'pain et courir vite vite rater l'train.
Qu'est-ce qu'on fait ?
On prend le prochain ?
On rebrousse chemin ?
C'est malheureux de ne jamais pouvoir anticiper le bonheur à porter de main... Notre départ à failli finir comme un pétard mouillé... à trois heures de la mer.

Mais une fois secoué, notre matin boiteux nous a mené, clopin-clopant, sur les traces du Commodore Perry, à Shimoda, rien que ça !


L'odeur de la mer...
Le goût du sel dans le rire des enfants bousculé par le vent...
Et le choc, la violence, la caresse des vagues comme une digue sur la peur de se dire que décidément, ça doit faire un sacré moment qu'on vivait tous là dedans, quand même.

Et s'allonger sur ses rêves...

Le soir, après une journée chaude, au-dessus de la mer sur la plage apprivoisée, la lune a choisi sa robe de terre cuite pour accompagner le soir et nous sourire, histoire de nous dire sans doute, s'il subsistait encore un soupçon, que non, on n'était décidemment pas venus pour rien...


Il reste encore un peu de quoi vous baigner les yeux...

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