Le Kabuki
La dernière fois que je suis allé au Kabuki, c'était aussi la première fois et... ma foi, c'est incroyable!
J'ai assisté à la représentation de la Douzième Nuit de Shakespear, adapatée pour le Kabuki par Ninagawa. S'il est très connu ici et ailleurs pour ses mises en scène des oeuvres de Shakespear, c'était la première fois qu'il s'essayait à l'art traditionnel du Kabuki.
L'endroit, déjà, donne le ton : on change d'atmosphère, on va changer d'ère.
Situé au coeur de Ginza, le quartier chic de Tokyo, à deux pas de l'Apple Store, le Kabuki-za, bien que construit en 1889, semble une pièce étriquée, difficilement rajoutée au puzzle des grands édifices modernes qui l'entourent. Sa vétusté est à l'image des valeurs qu'il rappelle à la modernité japonaise : alors qu'autour tout se construit en hauteur et se renouvelle sans cesse, l'imposante contruction traditionnelle demeure inchangée, à l'abri des modes et innovations qui pourtant partout ailleurs foisonnent.
A l'intérieur aussi les couleurs datent et pâlissent, les murs offrent des dégradés de marrons vieillis impossibles à recomposer, le plafond laisse courir les coulures le long des joints qui baillent...tout a pris la teinte de l'âge. Dehors, tout est souvent si neuf, si nouveau, toujours en avance d'un pas sur aujourd'hui qu'on se sent vieux et sans passé. Ici, enfin, on peut exister au milieu de quelque chose qui date et dont les fissures, les tâches ont toutes une histoire à raconter...
A l'instar de l'Opéra chez nous, le Kabuki est le lieu d'expression de la démesure : les costumes extraordinaires, les coifures de portraits, les sentiments contraires d'amour, d'honneur et de politique comme une armée dans le coeur des hommes...Mais si dans l'Opéra tout est exéburance et passions volubiles, le Kabuki se distingue par une retenue extrême et un goût certain pour les formes épurées. Tout y est figé : les émotions des visages sont moulées dans le maquillage, les mouvements sont lents, comme dessinés sur la scène, et les positions des personnages, éternelles.
Les décors, peints sur des panneaux mobiles au fond de la scène, derrière d'habiles constructions en perspectives, donnent une véritable profondeur à la scène. Celle-ci est d'ailleurs complètement mobile : la maison de la jeune princesse peut soudain s'enfoncer dans le sol ou disparaître dans les nuages, le jardin du palais impérial effectuer une rotation qui laisse apparaître, 180° plus tard, une plage de galets...Il est facile de se laisser prendre à cette danse lancinante, qui offre à chaque mouvement une vision nouvelle...et de s'endormir.
C'est bien ce qui est arrivé à ma voisine, qui pourtant s'énervait un peu du bruit du déclancheur de mon super appareil Topétou. Confus de perturber son spectacle, je me suis vite excusé et j'ai taché d'opérer en silence. Tss Tss Tss, j'avais plutôt dû la réveiller, oui ! Mais j'ai rien dit quand elle s'est mise à ronfler, j'suis pas rancunier...
J'ai continué à prendre des photos jusqu'à ce que j'entende chuchoter derrière moi et qu'à l'entracte un employé du théâtre,transpirant de gêne, paniqué sans doute à l'idée de devoir faire des remontrances en anglais, viennent me dire très gentilment que c'était strictly forbidden. J'ai donc dû faire semblant de lui montrer que je les effaçais docilement toutes, mais j'ai heureusement réussi a en sauver quelques-unes...
Un spectacle de Kabuki dure environ quatre heures et, pendant ce temps, on est plongé dans un japon sans âge, dans le précipité d'une forme artistique idéale qui fait oublier que dehors, le XXIème siècle ressemble plutôt à ça:
Mais ce n'est pas très grave, parce que de toute façon... j'y retourne demain !
J'ai assisté à la représentation de la Douzième Nuit de Shakespear, adapatée pour le Kabuki par Ninagawa. S'il est très connu ici et ailleurs pour ses mises en scène des oeuvres de Shakespear, c'était la première fois qu'il s'essayait à l'art traditionnel du Kabuki.
L'endroit, déjà, donne le ton : on change d'atmosphère, on va changer d'ère.
Situé au coeur de Ginza, le quartier chic de Tokyo, à deux pas de l'Apple Store, le Kabuki-za, bien que construit en 1889, semble une pièce étriquée, difficilement rajoutée au puzzle des grands édifices modernes qui l'entourent. Sa vétusté est à l'image des valeurs qu'il rappelle à la modernité japonaise : alors qu'autour tout se construit en hauteur et se renouvelle sans cesse, l'imposante contruction traditionnelle demeure inchangée, à l'abri des modes et innovations qui pourtant partout ailleurs foisonnent.
A l'intérieur aussi les couleurs datent et pâlissent, les murs offrent des dégradés de marrons vieillis impossibles à recomposer, le plafond laisse courir les coulures le long des joints qui baillent...tout a pris la teinte de l'âge. Dehors, tout est souvent si neuf, si nouveau, toujours en avance d'un pas sur aujourd'hui qu'on se sent vieux et sans passé. Ici, enfin, on peut exister au milieu de quelque chose qui date et dont les fissures, les tâches ont toutes une histoire à raconter...
A l'instar de l'Opéra chez nous, le Kabuki est le lieu d'expression de la démesure : les costumes extraordinaires, les coifures de portraits, les sentiments contraires d'amour, d'honneur et de politique comme une armée dans le coeur des hommes...Mais si dans l'Opéra tout est exéburance et passions volubiles, le Kabuki se distingue par une retenue extrême et un goût certain pour les formes épurées. Tout y est figé : les émotions des visages sont moulées dans le maquillage, les mouvements sont lents, comme dessinés sur la scène, et les positions des personnages, éternelles.
Les décors, peints sur des panneaux mobiles au fond de la scène, derrière d'habiles constructions en perspectives, donnent une véritable profondeur à la scène. Celle-ci est d'ailleurs complètement mobile : la maison de la jeune princesse peut soudain s'enfoncer dans le sol ou disparaître dans les nuages, le jardin du palais impérial effectuer une rotation qui laisse apparaître, 180° plus tard, une plage de galets...Il est facile de se laisser prendre à cette danse lancinante, qui offre à chaque mouvement une vision nouvelle...et de s'endormir.
C'est bien ce qui est arrivé à ma voisine, qui pourtant s'énervait un peu du bruit du déclancheur de mon super appareil Topétou. Confus de perturber son spectacle, je me suis vite excusé et j'ai taché d'opérer en silence. Tss Tss Tss, j'avais plutôt dû la réveiller, oui ! Mais j'ai rien dit quand elle s'est mise à ronfler, j'suis pas rancunier...
J'ai continué à prendre des photos jusqu'à ce que j'entende chuchoter derrière moi et qu'à l'entracte un employé du théâtre,transpirant de gêne, paniqué sans doute à l'idée de devoir faire des remontrances en anglais, viennent me dire très gentilment que c'était strictly forbidden. J'ai donc dû faire semblant de lui montrer que je les effaçais docilement toutes, mais j'ai heureusement réussi a en sauver quelques-unes...
Un spectacle de Kabuki dure environ quatre heures et, pendant ce temps, on est plongé dans un japon sans âge, dans le précipité d'une forme artistique idéale qui fait oublier que dehors, le XXIème siècle ressemble plutôt à ça:
Mais ce n'est pas très grave, parce que de toute façon... j'y retourne demain !