Le hip-hopital

Il y a quelques mois, j'ai rencontré Emma et Laura, deux photographes fraîchement diplomées de l'école des Gobelins, venues faire un reportage photo sur le hip-hop au Japon.

Elles n'avaient qu'un contact en arrivant ici, Hideto Tomabechi, un ancien moine bouddhiste collectionneur de Ferrari, devenu spécialiste en sciences cognitives.

Passionné de musique, Hideto aime aussi à jouer de la guitare lors de soirées SM à Tokyo. Anodin, me direz-vous. Eh bien non, détrompez-vous, car le Dr. Tomabechi est principalement connu pour ses théories sur "le lavage de cerveau positif" et travaille avec le ministère de la Défense afin de développer des mélodies subliminales qui dissuaderaient les terroristes dans le métro. Preuve en est, il n'y a d'ailleurs encore jamais eu d'attentat à Tokyo. Je vous vois venir... et la secte Aum alors ?! Eh bien justement, le jour de cette funeste entreprise, la police a appelé Hideto à la rescousse et il a fini par "déprogrammer" les illuminés au moyen de sonneries de téléphones portables, rien que ça.

Fort de ses recherches, il a ensuite élaboré une sonnerie qui fait pousser les seins des femmes, si si. Cette mélodie, savamment intitulée "RockMelon" met "inconsciemment en branle le cerveau et le corps" (sic) et a été téléchargée plus de 10 000 fois la première semaine.

Je vois, mesdemoiselles, des sourcils dressés, des lèvres en forme de moues, des pupilles incrédules et des commissures télencéphaliques moqueuses... Soit, libre à vous de rire des exploits de la science comme déjà l'on riait aux élucabrations de Galilée ! Mais si je vous disais moi, qu'ici, sur mon blog et nulle part ailleurs, vous aviez la possibilité de voir par vous-même, de dépasser les limites aliénantes de votre périmètre mammaire; si je vous disais que vous pouvez écouter cette sonnerie messianique, annonciatrice de folles journées blondes, décolorées et californiennes, n'auriez-vous pas le bout du doigt qui frétille ?

Eh bien n'attendez plus ! Détendez-vous !
Il vous suffit de cliquer, c'est juste en dessous :
Et mettez un casque, au cas où,
pour ne pas mettre le discrédit sur votre système hi-fi !

Sekushi, non ? Bien sûr, comme tout traitement thérapeutique, les effets se font sentir sur la longueur... Il est donc vivement conseillé d'avoir plein d'amis. Plus vous recevrez de coups de fil et plus... on risque de vous demander votre numéro ! C'est ça la logique de la science voyez-vous, ça vous prend à rebours...

Aujourd'hui, Hideto perfectionne ses sonneries et sera bientôt en mesure de nous permettre d'arrêter de fumer, d'attirer l'âme soeur ou encore de combattre la calvitie grâce à notre téléphone portable !

Bref, tout ça pour dire que Hideto était le premier contact d'Emma et Laura lorsqu'elle arrivèrent au Japon et qu'avec un premier contact pareil, ben on a forcément des expériences originales. Malgré son emploi du temps surchargé, Hideto réussit à trouver le temps de les traîner un peu partout et Emma et Laura furent invitées en back-stage de toutes les soirées les plus hype de la capitale. Elles purent ainsi rencontrer tous les tenants du mouvement bling bling nippon, de vrais rebels qui font des signes de gang avec leurs doigts et qui chantent des chansons d'amour avec une grosse voix... N'est pas né à Los Angeles qui veut, et même si les codes nécessitent qu'on ait l'air méchant, la réalité est un peu plus kawaï. Bref, apparemment même le hip-hop au Japon c'est mignon...

Un jour elles me proposèrent de les accompagner à la périphérie de Tokyo, quelque part sur la route de Yokohama, dans un hôpital désaffecté où elles allaient photographier deux grapheurs en action. Vu la rareté du centimètre carré désaffecté dans cette ville, j'acceptai aussitôt l'invitation !
Tout un hôpital ! Abandonné !
De l'espace vide, mort, libre et oublié !






Cet endroit est paraît-il la Mecque des grapheurs de tout le Japon. Il serait même un épicentre connu et respecté par la communauté des grapheurs du monde entier, une sorte d'Angkor Wat hip-hop si vous voulez. En tout cas, c'est un endroit qui a véritablement échappé au dictat fonctionnel de la ville et qui, selon les dires, subsiste grâce à la tolérance des yakuzas sur le territoire desquels il se trouve désormais. Un endroit oublié des officiels qui offre ses murs vides sur sept étages à la liberté créatrice des gribouilleurs de tous bords...







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